Je me permets de vous écrire aujourd’hui parce que je ne suis vraiment pas fière de vous, mais alors pas fière du tout (et cela n’a rien à voir avec votre dernier film Ma vie avec Liberace, qui, potentiellement, pourrait me rendre assez fière de vous, parce que ça a l’air franchement pas mal et que tout le monde est d’accord pour dire que vous avez livré une prestation géniale, du grand Michael, du grand Douglas, du grand Vous, en un mot). Rien à voir avec le cinéma, donc, je me suis un peu égarée entre parenthèses.
Je ne suis pas fière de vous parce que votre retour sous les feux de la rampe vous amène à donner des interviews. Jusque là, rien de bien grave, ça fait partie du job, c’est même tout à votre honneur, ça fait vendre des magazines qui en ont bien besoin, ça fait vivre des journalistes qui en ont bien besoin aussi, ça fait des entrées pour le cinéma qui en a bien besoin. Bref. L’économie s’en porte mieux. Pour cela, merci monsieur Douglas. Comme quoi, la lettre commençait mal et il peut y avoir du positif en toute chose.
Je ne suis pas fière de vous parce que franchement, vous vous rendez compte de ce que vous dites pendant les interviews ? Vous vous rendez compte que des GENS VOUS ECOUTENT ? Des gens vous PRENNENT COMME MODELE ! Alors, attention quoi, mince, il ne faut pas dire n’importe quoi.
Et vous, vous parlez de votre cancer de la gorge. C’est pareil, je n’ai rien à dire là-dessus. C’est bien d’en parler, c’est bien pour « les autres », pour « ceux qui sont confrontés à cette maladie », ça vous rend plus humain aussi, certes, vous aussi, malgré le strass les paillettes, malgré Catherine Zeta Jones, vous pouvez mourir.
Et puis c’est tendance le cancer, ça donne un petit côté Angelina Joli super glamour à tout ça, non franchement c’est chouette.
Mais, vous, tranquille le chat, vous dites, je cite : « J’ai eu un cancer de la gorge à cause du cunnilingus ». Premièrement, bravo Catherine, félicitations, ça me fait plaisir pour vous. Deuxièmement : WTF ? Je ne veux pas trop m’énerver, vous êtes vieux, je ne vais pas en plus vous rajouter des problèmes cardiaques, je respire un bon coup, je fais trois quatre exercices de yoga avant de reprendre notre conversation, Michael, et je répète, plus doucement : W. T. F ?
Je le redis : Vous êtes un modèle. Des gens vous écoutent. Des gens vous croient. Des gens pensent que ce que vous dites a valeur de vérité absolue. Des gens pensent dorénavant « le cunnilingus, ça donne le cancer de la gorge ». Si, si, je vous jure, il y a des hommes, maintenant, à cause de vous, qui pensent ça (et il y a d’autres qui font semblant de le penser, comme ça, on a tout gagné).
Je ne sais pas si vous vous rendez bien compte de la bombe que vous venez de lancer. Des centaines d'années de lutte pour une reconnaissance du plaisir clitoridien viennent de voler en éclat. Et je pèse mes mots. En une seule interview. (tout ça pour vous "angelina-iser", y a pas de quoi se vanter).
Ça veut dire que nous, les filles, pauvres mortelles et même pas Catherine Zeta-Jones, dans les prochains jours /semaines / mois (et peut être même années, allez savoir, je ne mesure peut-être pas bien l’impact du truc. Ça se trouve je suis optimiste en plus !), on va s’entendre dire « Ah, non, c’est pas que je ne veux pas, c’est que le cunni, ça donne le cancer de la gorge. » et aussi « Ça m’embête autant que toi, je te jure. », ou encore « C’est Michael Douglas qui l’a dit. »
Voilà, voilà.
Quand on sait que seules 20% des femmes sont vaginales, je vous laisse imaginer le désastre sexuel qui attend les 80% qui restent.
« Par contre, la fellation, ça fait rien. Niveau cancer je veux dire »
Voilà.
Je ne vous dis pas merci.
Illustration :